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LE PRINCE TRAVESTI

Le Prince Travesti ou L’Illustre Aventurier

LÉLIO
« Depuis que j’ai quitté les États de mon père, je n’ai fait nulle part un séjour si long qu’ici, à quoi donc aboutira-t-il ?
Mon père souhaite que je me marie, et me laisse le choix d’une épouse. Ne dois-je pas m’en tenir à cette Princesse? Elle est aimable, et si je lui plais, rien n’est plus flatteur pour moi que son inclination ; car elle ne me connaît pas. N’en cherchons donc point d’autre qu’elle ; déclarons-lui qui je suis, enlevons-la au Prince de Castille qui envoie la demander.
Elle ne m’est pas indifférente ; mais que je l’aimerais sans le souvenir inutile que je garde encore de cette belle personne que je sauvai des mains des voleurs.»
(Acte I, scène IV)

Afin d’explorer le monde, de connaître la nature humaine et éventuellement de trouver sa future épouse, le Prince de Léon se fait passer pour un aventurier. En toute discrétion, il se fait donc appeler Lélio et engager au service de la Princesse de Barcelone. Aimé de la Princesse, Lélio s’éprend de la modeste mais fougueuse Hortense.

Qu’en sera-t-il alors de la puissance de la Princesse ?

Arlequin, poursuivant Lisette, arrivera-t-il à ses fins ?
Frédéric, conseiller de la Princesse, courant des uns aux autres, éperdu d’ambition et acharné à avoir, qu’aura-t-il ?

Le Prince Travesti ou l’Illustre Aventurier est une comédie romanesque en trois actes et en prose de Marivaux, créée pour la première fois le 5 février 1724, par les Comédiens italiens à l’Hôtel de Bourgogne.

La pièce est annoncée comme une comédie. Pourtant la présence de princesse, de prince et d’ambassadeur est difficilement compatible avec le genre. Le premier compte-rendu de la pièce du Mercure, en 1824, la présente comme « une comédie héroïque ». Les contemporains de Marivaux parlent aussi de « di cappa e spada » (comédies napolitaines dans lesquelles sont représentés à la fois des princes et des gens de basse condition) ou de comédie du siècle d’or espagnol. Le genre de la tragi-comédie a également été évoqué dans la mesure où la pièce présente un mélange de tons et de dénouement heureux. Les relations amoureuses sont liées, comme chez Shakespeare, au jeu du politique : pour assurer la paix avec la Castille, la Princesse doit épouser le Roi de Castille. Mais elle est amoureuse de Lélio et en attendant de l’épouser, souhaite le nommer Secrétaire d’Etat à la place de Frédéric, son vieux conseiller.
Le Prince Travesti est d’autre part la pièce où Marivaux, journaliste et observateur de son temps, se fait le plus polémique : la pièce est censée se passer en Espagne, au XIIème siècle au moment de la guerre entre l’Aragon et la Castille. Mais c’est surtout la Régence qui est donnée à voir : période d’entre-deux où les valeurs de l’ancien régime battent de l’aile.

UBU ROI

NOTRE UBU

En chacun d’entre nous sommeille un Ubu, notre Ubu. Il est là, tapi au plus profond de nous-mêmes. Nous, comédiens, apprenons par cœur les mots que le Poète nous a légués ; nous les répétons sur le plateau et, chaque fois que nous les prononçons, avec la plus grande intensité possible, un sens nouveau jaillit et vient alors annuler tout ce que nous croyions savoir du texte.

Le texte opère comme un révélateur des milliers de personnages que nous pourrions être dans la vie quotidienne.
Il nous permet de devenir celui ou celle que, peut-être, nous ne serons jamais, mais qui pourtant demeure au plus profond de nous. Il nous arrive de prétendre, après quelques mois d’étude, avoir compris le message de l’auteur. Des chercheurs l’étudient pendant de longues années et écrivent même des thèses sur lui. Mais le comédien a la certitude qu’à chaque fois qu’il est sur scène, toutes ses convictions se dérobent en même temps qu’il exhale le mot.

Nous pensons parfois que nos Maîtres, qui ont déjà monté la pièce, ont fait la bonne interprétation du fameux : « De par ma chandelle verte ! » Alors, humblement, nous tâchons de suivre leurs pas. Mais hélas, la phrase nous reste aussi inconnue qu’un soupir qui viendrait subitement casser le rythme de la respiration.
Alors le comédien continue à se préparer, en silence, et avant de monter sur le plateau, il dit aux Dieux du théâtre : «Que votre volonté soit faite», en sachant que ces Dieux séjournent dans l’Olympe de notre Enfance, où se trouve la réelle interprétation du texte, qui ne sera «authentique» que durant le temps où le comédien prononcera le mot.
Le comédien-enfant, aidé du texte du Poète, deviendra alors le Roi de l’immense et merveilleux royaume de son propre imaginaire.

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