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L’ENFANT DE VERRE

Quelque part dans les mers du Nord, perché sur une falaise, le royaume de verre de la famille Kilvik donne l’illusion d’un diamant parfait. À l’intérieur, tout, absolument tout est en verre : la vaisselle, les tables, les murs, et une délicate mésange, dont les filles héritent par tradition le jour de leurs 15 ans. Ce soir, Liv reçoit l’oiseau des mains de sa grande sœur. Mais au petit matin, la mésange s’est brisée dans sa paume. « L’accident » inaugure le début d’un bouleversement familial… comment trouver le courage de dire ? Faut-il percer la cloche de silence au point de fracturer tout l’édifice ?

Alain Batis, Léonore Confino et Géraldine Martineau nous plongent dans une fable lumineuse, aux confins du fantastique. L’enfant de verre puise son inspiration dans un sujet qui nous concerne tous : la famille, ses secrets et ses non-dits.

Un plateau de sable blanc. Sept miroirs verticaux sans teint occultent, dédoublent, révèlent…

Des costumes s’effeuillent comme des couches successives de la vie.

Un univers musical contrasté mêle percussions, piano et instruments électroniques.

Portée par sept comédien.n.e.s, la pièce tisse une partition théâtrale, visuelle, chorégraphique et convoque une parole profondément libératrice.

DÉSINTÉGRATION

« Nos parents ne joueront jamais au tennis, au badminton, au golf. Ils n’iront jamais au ski. Ils ne mangeront jamais dans un restaurant gastronomique. Ils n’achèteront jamais un bureau Louis Philippe, une bergère Louis XV, des assiettes Guy Degrenne, des verres Baccarat, ni même un store Habitat. Ils n’assisteront jamais à un concert de musique classique. Ils ne posséderont jamais de leur vie un appartement ou une jolie propriété quelque part en France où finir leurs jours tranquillement. Non, ils ont préféré investir dans des maisons au bled, en ciment, au prix de plusieurs décennies de sacrifices, qui ressemblent vaguement à des cubes et qu’ils appellent des villas. »

Une voix tente de se faire entendre. Celle d’une génération, celle que l’on nomme ‘issue de l’immigration’. Ils sont français, nés en France, mais un peu trop colorés pour être acceptés. D’un exotisme attachant lorsqu’ils a des gâteaux après l’Aïd, ce sont les mêmes que l’on regarde avec appréhension dans un wagon désert, le soir. Cette voix passe au crible tout ce qui les a construits, tout ce qui a généré ce tiraillement perpétuel, cette révolte sourde.

Les tabous, les traditions, la pauvreté et l’humiliation s’ajoutent au regard de la France qui, forte de son passé colonial, leur voue un amour hypocrite. Une nation en laquelle ils placent cependant leurs espoirs, mais pour les voir aboutir, les mentalités doivent changer. Alors que l’immigration ne quitte plus le débat politique, Ahmed Djouder écrit un texte d’une force inouïe dans laquelle il dresse les carences de l’intégration.

LES FLEURS DU TEMPLE

LES FLEURS DU TEMPLE
Un conte indien

La Pièce

Un prêtre brahmane mène une vie paisible, entièrement vouée à son temple et au Lingam, symbole du dieu Shiva et de l’énergie masculine.
Sa furtive rencontre avec Ranganayaki, courtisan d’une extrême beauté, vient soudainement bouleverser les conventions de son existence d’homme pieux, de mari fidèle et de sujet dévoué à son roi.
Confondu, il implore Shiva de lui venir en aide.
A travers l’adaptation de ce conte en un monologue dramatique, Girish Karnad, un des plus grands auteurs du théâtre indien contemporain, attire l’attention sur des sujets qui lui tiennent à cœur : l’hypocrisie des conventions, le conservatisme, le fanatisme religieux, qu’il combat tous.
Mais c’est aussi, et surtout, à mes yeux, un texte érotique sur le questionnement philosophique du désir et de la sagesse et les conflits intérieurs auxquels les êtres humains peuvent être confrontés.
Le péché même pour ceux qui n’ont pas la foi, est d’aller à l’encontre de sa propre conscience.
La vérité ne se résume pas dans la révélation divine mais le chemin que chacun parcourt dans sa propre conscience pour la découvrir et être en harmonie avec elle.

Cette pièce est  jouée et chantée par Asil Rais qui est aussi  le metteur en scène.

Asil Raïs

L’AVARE

Dans cette comédie, Harpagon impose à ses enfants et ses servant·e·s une austérité qui tourne au cauchemar. Il brime sa maison, rechigne sur chaque dépense jusqu’à plonger chacun·e dans un profond désarroi. Son avarice semble sans limite : il prive ses enfants des ressources indispensables à leur épanouissement, le cuisinier des moyens nécessaires pour nourrir la maison, les servant·e·s de leurs étrennes et les chevaux de leur foin…

Harpagon redoute ce que chacun·e peut lui coûter. Il cherche à marier sa fille sans devoir en payer la dot, s’adjoint les services d’une entremetteuse et d’un commissaire sans vouloir en payer les honoraires… Il lui est impossible de donner de l’argent sans avoir le sentiment qu’il se saigne, qu’il se vide de l’essentiel. Il veille sur ses économies comme sur sa vie, jour et nuit, redoutant que le moindre bruit annonce l’arrivée d’un voleur, suspectant son entourage jusqu’à ses propres enfants.

Il enterre et déterre mille fois par jour une cassette remplie d’écus, objet transitionnel, tentative désespérée de conjurer la mort. Persuadé que son or est un refuge au monde des vivants, il thésaurise. Harpagon est avare, certes, mais c’est pour lui une question de survie.

L’Avare est une pièce sur la mort, la jeunesse et l’argent. Molière y dépeint avec précisions, dérisions, excès, toute la folie d’un homme gagné par l’avarice. Cette comédie est une fable sociale sur l’ordre patriarcal, qui dénonce sa cruauté et la place réservée à la jeunesse.

LA PAIX PERPÉTUELLE

« Odin‚ Emmanuel et John-John sont les trois chiens finalistes du concours d’intégration à la prestigieuse unité antiterroriste K7. Il reste trois épreuves et un seul « collier blanc » à la clef. Selon Odin‚ les perdants seront « transformés en saucisses »‚ autant dire que l’atmosphère est tendue […       ]. Trois chiens‚ trois personnalités qui nous ressemblent. Sommes-nous meilleurs qu’eux ? À vous de juger ! »
Présentation des éditions Les Solitaires Intempestifs

Le lieu : un huis clos, sorte de rectangle vide, hangar sans ouverture et coupé du monde, vaste conteneur dont l’éclairage proviendrait dont ne sait où. Il y a de soudaines interventions de la musique.

La brutalité, la violence des personnages n’évacuent pas l’humour. Et l’humour n’évacue pas la brutalité et la violence. Et l’émotion.

Ces chiens trop humains sont-ils des mercenaires, des légionnaires de choc, des sous-prolétaires réquisitionnés et dressés pour être envoyés au feu moyennant finance ?

Qui a raison des trois chiens ? Odin, le rottweiler, lui le véritable mercenaire, rusé, revenu de tout, rejetant toute idéologie et toute morale et qui se vend au plus offrant ? John-John, le plus jeune, croisé entre plusieurs races, sorti frais émoulu – et passablement perturbé ! – de la meilleure école de combat et qui se veut résolument fidèle à l’homme ? Emmanuel, le berger allemand, en questionnement sur cette violence, humaniste, éduqué par une jeune maîtresse qui suivait des cours de philosophie ? Ou Cassius, le vieux labrador esquinté qui dirige le concours, figure héroïque et guerrière de l’anti-terrorisme ? Ne serait-ce pas en définitive L’Humain qui cherche le bon équilibre entre la violence de la raison d’Etat et la préservation de la démocratie ?

 Chacun à sa manière a ses raisons.

Aujourd’hui, en contraste avec la précédente pièce de Mayorga, Le Cartographe (ample pièce grave autour du ghetto de Varsovie), montée par la compagnie en 2021 au Théâtre de L’Opprimé, Hervé Petit, accompagné d’une partie de la même équipe,  a choisi cette allégorie animalière bouffonne et grave, profonde et légère. Un élément dramatique commun cependant  aux deux pièces l’a retenu particulièrement : la révélation d’un fait tragique  intime dans le cours de chacun des deux récits dramatiques, historique et politique dans Le Cartographe, contemporain, drolatique et d’actualité dans La Paix perpétuelle. Nous n’en dirons pas plus.

Juan Mayorga est né en 1965. Docteur en philosophie‚ professeur de dramaturgie à l’École royale supérieure d’art dramatique de Madrid‚ il est aujourd’hui l’un des auteurs espagnols les plus importants de sa génération. Il est auteur également d’essais sur la politique et sur le rapport de l’écriture dramatique à lʼHistoire. Ce questionnement se retrouve dans la trentaine de pièces qu’il a écrites à ce jour et qui ont quasiment toutes été mises en scène‚ publiées et traduites en plusieurs langues.

C’est un barcelonais, Josep M. Benet i Jornet, grande figure du théâtre catalan contemporain, et dont la cie a monté précédemment quatre de ses pièces traduites du catalan, qui a fait connaître à Hervé Petit le madrilène Juan Mayorga.  Josep –Papitu comme on l’appelait dans son pays- nous a quittés récemment. Qu’il lui soit ici rendu hommage.

PIRANDELLO SUITE

Pirandello Suite est un spectacle composé de trois pièces courtes, trois chefs-d’œuvre du maître sicilien Luigi Pirandello : Le brevet de sorcier, L’imbécile et La fleur à la bouche.

Dans le premier, Rosario Chiarchiaro, rendu fou par l’exclusion sociale, exige une licence, une sorte de brevet qui sera pour lui la reconnaissance de son présumé pouvoir de sorcier. Il se retrouve face au juge André, convaincu sérieusement que la malchance n’existe pas, mais Chiarchiaro est d’un tout autre avis.

Dans L’imbécile, Leopoldo Paroni est le directeur d’un petit journal de province qui n’hésite pas, via son journal, à diffamer ou souhaiter la mort de ses adversaires politiques. Quand il reçoit la visite d’un vieil ami un soir de grande agitation en ville, il est loin de s’imaginer que ses mots se retournent contre lui-même.

Dans le dernier volet de cette trilogie, l’action se passe une nuit d’été dans le bar d’une petite gare sur la côte sicilienne. Un homme qui a raté son train est entraîné dans une conversation troublante par « L’homme à la fleur à la bouche ». Petit à petit, celui-ci dévoile un fatal secret, un tremblement de terre intime, sous l’humour et l’élégance distanciée d’un homme affable.

Les pièces sont jouées en italien surtitré, ce qui permet aux spectateurs de découvrir la richesse de la langue et de la culture italiennes tout en appréciant ces chefs-d’œuvre intemporels.

LE MARCHAND DE VENISE

Les siècles qui nous séparent de la Renaissance ne nous empêchent pas de porter un regard contemporain sur la république vénitienne, et d’établir un parallèle entre sa société et la nôtre.
Le Marchand de Venise nous permet ainsi de questionner nos intolérances, car au-delà de nos différences culturelles, nous partageons tous les défauts et les qualités de l’âme humaine qui nous est commune : telle est la leçon que Shakespeare nous enseigne.

 

IL EST INTERDIT DE VIEILLIR

La problématique du vieillissement est le thème principal de ce spectacle avec comme bannière la curieuse injonction d’un grand sage juif, Rabbi Nachman de Braslav : « Il est interdit de vieillir ! ».
Que veut-il dire ?
L’abandon des rêves ? Le rétrécissement des désirs ?
Un corps défait qui entraîne la défaite de la pensée, le dépérissement de l’imaginaire ?
L’assignation à un rôle, celui du vieux qui devrait rester à sa place. Mais alors quelle est sa place dans la société actuelle ? Considérer qu’on n’a plus rien à apprendre que ce n’est plus de notre âge ? Se refuser à faire des déclarations d’amour ? Se méfier comme de la peste de l’imprévu ?
Camper sur ses positions comme un vieux général qui applique toujours les mêmes stratégies et qui sera évidemment défait ? Fuir les jeunes et la nouveauté ?
Ne plus entendre en soi l’enfant qui continue à réclamer, mais de moins en moins souvent, sa part d’improvisation, de joies, de plaisirs et de rires ?
Ne plus entendre le jeune homme qui rêve de grandes choses, de l’âme-sœur, de liberté, de voyages, de rencontres ?
Ne plus être que dans la répétition obsessionnelle de ce qu’on n’est plus ?
Comparer, comparer et encore comparer le passé et le présent ?

L’instant présent peut alors s’évanouir. On ne perçoit plus sa nouveauté et ceci au profit de la répétition de ce qu’on connaît. La vie s’en va doucement et le vivant se laisse bouffer par la répétition des choses ou par la nostalgie de ce qui n’est plus.

Mais en réalité, l’homme âgé possède tous les âges. Il ne doit pas se résigner à n’entendre que la seule voix du vieillissement.

NOUS REVIENDRONS AU PRINTEMPS

Nous reviendrons au printemps nous plonge dans l’œuvre iconique de Tchekhov, La Cerisaie, en mêlant mouvement, musique et média. Les spectateurs sont placés au cœur de l’histoire, grâce à un dispositif qui les invite non seulement à regarder et écouter mais aussi à explorer le monde qui les entoure. Le public est petit à petit amené à aller au-delà de l’apparente beauté immaculée des cerisiers en fleur pour voir ce qui, à la racine, empoisonne la cerisaie stérile. Adapté par le metteur en scène Simón Adinia Hanukai en collaboration avec les comédiens, le texte arbore une esthétique contemporaine et une nouvelle section quasi-onirique qui transporte les spectateurs dans le subconscient des personnages pour comprendre et éprouver ce qui les freine à l’aube d’un changement inéluctable.
Nous reviendrons au printemps conserve l’essence des questions soulevées par Tchekhov à un moment de transition majeur pour la société russe, mais les regarde à l’aune des enjeux qui secouent l’Europe du XXIe siècle : qui peut aujourd’hui appeler la Cerisaie sienne ?

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T.C.H.E.K.H.O.V.

Traversée Charmante avec Haltes Exploratoires de la Kyrielle d’Humeurs d’une Œuvre Vécue a pour acronyme TCHEKHOV et cela tombe bien parce que c’est justement son œuvre et lui-même que notre spectacle met en conversation.

Et pour animer la parole, trois comédiennes prennent les rôles des personnages de sa vie – son père, ses frères et sa sœur, son éditeur, ses amours, sa femme…- et leur donnent les mots des personnages de ses pièces.

Elles racontent, avec drôlerie et tendresse, le jeune homme qui subit la faillite de sa famille, l’étudiant en médecine qui subvient aux besoins de ses proches, l’auteur débutant qui arpente les rédactions de Moscou, l’aventurier qui part explorer le bagne de Sakhaline, l’humaniste qui crée des dispensaires et des écoles à Melikhovo, l’homme de théâtre qui invente une façon de sonder les âmes, l’homme malade qui s’ennuie gaiement à Yalta…

Trois voix pour dire un homme qui a si bien travaillé à les raconter, les hommes, qui a si bien montré que  » l’essentiel, c’est que les hommes sont des hommes, et qu’ensuite seulement, ils sont évêques, Russes, boutiquiers, Tatars, ouvriers. Que les hommes sont bons ou mauvais non en tant que Tatars ou Ukrainiens, ouvriers ou évêques ; les hommes sont égaux parce qu’ils sont des hommes.  » (Vassili Grossman). Trois voix et de la musique pour les accorder à l’âme russe.